En 1650 –Louis XIV (1638-1715) est alors Roi– les hostilités reprennent entre les châtelains de la Sévrie et ceux de Maulévrier. La dame de la Sévrie, qui était alors marquise de Laval-Lezay, fit des démarches pour obtenir que sa châtellenie de la Sévrie fût érigée en baronnie. Le comté de Maulévrier appartenait alors à Arthur Gouffier, Duc de Roannez, qui voyait avec amertume l’astre de sa famille, autrefois si brillant, pâlir et s’effacer devant celui de la dame de la Sévrie. Non seulement il mit opposition à la demande de celle-ci, mais encore, il résolut de faire un coup d’éclat pour assurer ses droits de suzeraineté sur la paroisse des Cerqueux, et le moment lui parut d’autant plus opportun qu’on était alors au plus fort des troubles de la Fronde.
En conséquence, il sollicita et obtint une sentence qui lui reconnaissait les droits en question et l’autorisait à les faire valoir.
Par ses ordres, André Chevreau, Président du grenier à sel de Cholet et intendant du comte de Maulévrier se transporta aux Cerqueux et entra à force ouverte dans l’église, accompagné de plus de 60 ou 80 personnes, après en avoir fait comme un siège. Le banc des Seigneurs de la Sévrie, leurs titres et armes, furent arrachés, bouleversés et désunis par cette troupe en délire. Puis on pénétra dans le caveau qui renfermait leurs tombes. Après les avoir brisées, on en arracha les ossements et on finit par combler le dit caveau.
Dans le procès auquel donnèrent lieu ces actes de violence, on est allé jusqu’à prétendre qu’on avait commis dans cette circonstance toutes les indignités qu’on pouvait faire aux cendres des morts, sans respect du lieu ni de la religion ; que non seulement on avait rompu et brisé les tombes qui s’y trouvaient depuis plusieurs siècles mais qu’on avait encore emporté les débris des cercueils de plomb jusqu’aux « araires » et joué à la boule avec des restes, le tout avec des paroles de mépris et de dérision extraordinaires. [1]
Le 8 juillet 1650, la dame de la Sévrie fit dresser un procès-verbal constatant que Eusèbe du Puy du Fou et ses trois enfants étaient inhumés dans le caveau qui est sous le grand autel de l’église des Cerqueux, où des témoins affirment avoir vu ou avoir appris par la tradition qu’on mettait les Seigneurs des Cerqueux et de la Sévrie comme fondateurs de la dite église. Le même jour, la dite dame fit descendre cinq châsses renfermant les ossements de ses prédécesseurs dans le caveau placé sous l’autel, qu’elle fit déblayer. Quant aux restes d’Eusèbe du Puy du Fou, son père, elle somma le curé de procéder à leur inhumation dans le chœur de son église, comme aussi de nommer dans ses prônes les Seigneurs de la Sévrie comme seigneurs et patrons de la dite église.
Un autre procès-verbal fut dressé à la requête de la dite dame pour procéder au rétablissement dans l’église des armes et écussons qu’on droit d’y mettre les Seigneurs des Cerqueux et de la Sévrie.
Cependant, le curé des Cerqueux[2] n’avait tenu aucun compte des sommations qui lui avaient été faites les 9 et 28 juillet 1650. Madame de la Sévrie fit dresser un  constat de son refus. En même temps, par une requête adressée au Parlement, elle contesta la décision obtenue par le Comte de Maulévrier comme seigneur Suzerain de la Paroisse des Cerqueux et en vertu de laquelle avaient eut lieu les voies de fait qui précèdent.
Par arrêt d’octobre 1650, le Parlement fit droit à l’appel de la suppliante et lui permit de faire enterrer qui bon lui semblerait. Alors sa mère, comtesse de Neuillan, se joignit à elle pour demander justice des excès commis dans l’église des Cerqueux et elle obtint un monitoire de l’Evêque de La Rochelle contre ceux qui en avaient été les auteurs. Mais les curés de Maulévrier, de Saint Pierre et de Saint Hilaire des Echaubrognes, refusèrent de publier ce monitoire prétextant que cela regardait le Seigneur de Maulévrier.
Par suite d’un arrêt du 8 octobre, Madame de la Sévrie fit dresser devant l’église des Cerqueux un poteau avec ses armes pour constater son droit de Dame de la Paroisse, après avoir fait enlever celui des Seigneurs de Maulévrier.
Le 19 février 1651, la Comtesse de Neuillan fit dresser procès-verbal du refus fait par le curé de Maulévrier et des deux paroisses des Echaubrognes de publier le monitoire de l’Evêque.
Le 17 mars suivant, le Sénéchal de Maulévrier somma ceux qui avaient fait planter des poteaux en la paroisse des Cerqueux d’avoir à les enlever et à reconnaître le Seigneur de Maulévrier comme seul haut justicier de la dite paroisse.
Cependant, le sieur Chevreau et plusieurs qui avaient été dénoncés furent arrêtés par le prévôt des maréchaux de Poitiers et conduits dans les prisons de cette ville. Des motifs politiques ne furent sans doute pas étrangers à l’arrêt du 8 octobre et aux arrestations qui s’en suivirent car le Duc de Roannez[3] affectait un grand zèle pour Mazarin et il n’en fallait pas davantage pour tourner le Parlement contre lui.
Quoi qu’il en soit, le Comte de Maulévrier fit grand bruit de l’arrestation de son intendant et il se pourvut par toutes voies de justice contre elle[4] et contre les prétentions qui en avaient été le sujet. Il fit même arrêter ceux qui avaient enlevé les poteaux.
Le Roi, par lettre patente du 16 février 1652, annula toutes les procédures tenues jusqu’à ce jour entre les Seigneurs de Maulévrier et de La Sévrie au sujet des droits honorifiques, prononça l’élargissement des personnes arrêtées et attribua à son conseil la connaissance de toute cette affaire.
Le 1er mars 1652, arrêt du conseil d’Etat ordonnant que les poteaux du Comte de Maulévrier soient rétablis par la Dame de la Sévrie.
Remis en liberté, le sieur Chevreau intenta un procès pour arrestation illégale et pour violences commises en sa personne. Il le perdit en 1654. Un arrêt du Parlement en 1663 condamna Chevreau et ses complices à faire dire chaque année deux services dans l’église des Cerqueux et à payer 600 livres pour des messes, 200 livres pour donner du pain aux pauvres, à rétablir les cercueils de plomb et à remettre les ossements dans les caveaux.[5]
On les a redécouverts en 1831. (Lire le récit)
Bref, ces deux ans de procès signifièrent le début de la fin pour le seigneur de Maulévrier car au mois de juin 1653, la Châtellenie des Cerqueux fut érigée en Baronnie.
[1] Archives départementales de Maine et Loire
[2] Il s’agissait à l’époque du curé Boudier, ex-prieur de Saint Paul du Bois, installé le 16 janvier 1648.
[3] Seigneur de Maulévrier
[4] Madame de la Sévrie
[5] D. Fonteneau, page 25 selon le Curé Braud.

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