Dès le XIème siècle, les églises sont construites près du château. Autour de l’église s’organisent le cimetière, le presbytère et les dépendances. A cette époque, la terre des Cerqueux formait une châtellenie avec un château fort, détruit dès le milieu du XIVème siècle, sans doute élevé à l’emplacement actuel de la mairie. Suite à cette destruction, la châtellenie fut transférée à La Sévrie. A l’époque, et ceci jusqu’à la création du département de Maine et Loire au moment de la Révolution, les terres de la Sévrie faisaient partie de la province d’Anjou.
Les conflits Seigneuriaux sont légion au Moyen-âge. Au XIIème siècle, le Seigneur temporel de la paroisse était d’abord le Comte de Maulévrier, puis celui de la Sévrie. Mais, pendant des siècles, les Seigneurs de Daillon n’eurent de cesse de contester les droits des Seigneurs de La Sévrie sur la paroisse, et réciproquement. Le Seigneur de Maulévrier, observant ces conflits de loin, puis y prenant part, chercha en permanence à en tirer profit.
Dans la suite de cet article nous allons observer les relations des différents Seigneurs successifs entre eux, entre eux et la paroisse, ainsi que les interventions des curés, vicaires, chanoines ou évêques intéressés. Notre intérêt se portera en priorité sur la paroisse et l’église des Cerqueux, laissant au second plan, bien que forcément très présente, l’histoire féodale du lieu.
Pour cette période, qui va s’étendre de la fin du XIVème siècle [1] jusqu’à la veille de la révolution de 1789, nous allons, autant que possible, respecter la chronologie des faits et tenter de les replacer dans leur contexte historique.
Aux alentours de 1 400, Charles VI [2] étant alors Roi de France, Macé des Cerqueux [3], seigneur de la Sévrie, accorda à la cure des Cerqueux le droit de percevoir les dîmes [4] à la condition qu’il serait dit le mercredi de chaque semaine une messe basse et un Subvenite [5] à chanter sur la tombe de ses prédécesseurs enterrés dans l’église des Cerqueux [6].
Ainsi que nous l’avons écrit plus haut, le seigneur temporel de la paroisse était d’abord le comte de Maulévrier, puis celui de La Sévrie. Pourtant, dans son testament du 11 janvier 1432, sous le roi Charles VII [7], Pierre de Daillon et son épouse Christine élisent leur sépulture en l’église de St-Jean des Cerqueux, devant l’autel Notre-Dame, où le père et la mère de Pierre étaient déjà enterrés. Ils font diverses fondations à cette même chapelle Notre-Dame et à la chapelle Sainte-Catherine du château de Daillon. Ces fondations octroyaient aux deux chapelles divers biens situés au bourg des Cerqueux.
Il faut savoir qu’au Moyen-âge, un souverain ou un seigneur pouvait signer une charte de fondation lors de la décision de construction d’une église, d’une chapelle ou d’une abbaye, qu’il finançait par un don ou un legs, parfois par testament, souvent avec des contreparties comme un droit de prééminence et (ou) l’obligation de célébrer des messes en mémoire du fondateur ou de tel ou tel de ses proches.
Le droit de « prééminences d’église » était un droit seigneurial, surtout honorifique, qui permettait à ceux qui en jouissaient, généralement les seigneurs, d’avoir des places réservées dans une église, une chapelle ou une abbaye, au premier rang de la nef, et même souvent dans le chœur. Ce droit était généralement accordé à la suite d’un contrat de fondation (ou d’une donation) effectué au profit du sanctuaire concerné.
La fille de Macé des Cerqueux, prénommée Jeanne, avait épousé Jean du Puy du Fou, ce qui lui avait permis d’augmenter considérablement les revenus de la famille. Devenue veuve, elle se vit relancer par le curé des Cerqueux qui ne trouvait pas suffisant le don fait autrefois par Macé des Cerqueux et en demandait l’augmentation, ce qui lui fut accordé le 25 juillet 1474.
En secondes noces, Jeanne des Cerqueux, dame de la Sévrie se remaria avec Guy de Rochefort qui, par cette alliance, devint Seigneur de la Sévrie. Par acte du 22 août 1479, sous Louis XI [8], Eustache de Montbron, Seigneur de Maulévrier, concéda à Guy de Rochefort, Seigneur de La Sévrie, pour le récompenser des louables services qu’il en avait reçu, la faculté d’avoir un banc dans l’église Saint-Jean des Cerqueux. Lui-même se réservant, comme patron et fondateur de la paroisse, le droit de mettre le sien « en dessus » (devant). Il obtînt aussi le droit de se faire enterrer dans le chœur, en laissant le haut lieu pour les Seigneurs de Maulévrier. Il pût enfin faire apposer ses titres et armes dans l’église, mais seulement en dessous de ceux des seigneurs de Maulévrier.
En 1494, sous Charles VIII [9], Louis de Daillon augmenta encore les fondations [10] et fonda en outre deux messes en la chapelle Sainte-Catherine de Daillon. D’autres rentes enrichissaient alors le temporel de la cure [11].
Comme on le constate en cette fin de XVème siècle, tout semble aller pour le mieux dans les relations entre les Seigneurs de Maulévrier, les Puy du Fou de La Sévrie et les De Daillon de… Daillon. Ils créent des fondations à qui mieux mieux et octroient des rentes à la cure des Cerqueux. Les seigneurs de la Sévrie se font enterrer dans le chœur de l’église et ceux de Daillon devant l’autel Notre-Dame.
Mais tout allait changer très vite, surtout entre les Puy du Fou et les Daillon, le seigneur de Maulévrier se cantonnant, au début, à être observateur ou… juge. La raison ? Les alliances successives de Jeanne des Cerqueux.
Maurice du Puy du Fou, fils de Jeanne des Cerqueux, qualifié comme Seigneur de la Sévrie en 1485 et 1499, épousa N. de Maumusson en 1485. Il en eut un fils, René du Puy du Fou.
René devenait donc le légitime Seigneur de la Sévrie. Mais c’était sans compter sur Jeanne des Cerqueux, sa grand-mère, qui, après le décès de son second mari, Guy de Rochefort, épousa Pierre de Daillon dont elle eut un fils, Pierre. Les De Daillon tentèrent alors de s’arroger la toute puissance sur les Cerqueux au détriment de René du Puy du Fou, Seigneur légitime de la Sévrie.
Sentant sans doute le vent tourner, ce dernier passa un accord le 6 janvier 1522, sous le règne de François 1er, [12] avec Hélène de Hangest de Genlis [13], Dame de Magny, Baronne de Maulévrier et mère de Claude Gouffier de Roanne, [14] Comte de Maulévrier. Cet accord renouvelait celui passé en 1479 par Guy de Rochefort. [15]
François du Puy du Fou, Seigneur de la Sévrie, fils de René, eut d’importants démêlés avec Joachim de Daillon [16], cousin de Pierre, qui voulait se faire reconnaître comme Seigneur de la paroisse des Cerqueux, à l’exclusion des Seigneurs de la Sévrie. Dans ce but Il avait fait occuper l’église pendant 19 jours par des gens d’armes masqués et fait enlever violemment de l’église des Cerqueux tous les emblèmes de leur lignée et était même allé jusqu’à violer les tombes de cette famille et notamment en arracher le corps de René du Puy du Fou, décédé.
Deux sentences de la Sénéchaussée d’Angers constatent l’authenticité de ces faits très graves. Par la première du 16 mars 1528, le seigneur de Daillon fut condamné à rétablir les bancs, titres et oratoire qu’il avait enlevés de l’église des Cerqueux ; et par la seconde du 2 octobre 1530, il est dit qu’il réintégrera dans le chœur de l’église des Cerqueux le corps de René du Puy du Fou qu’il avait fait exhumer et qu’il fera célébrer tous les mois de l’an un service pour le repos de son âme.
Cette dernière sentence s’appuie sur une déclaration de Pierre de Daillon, époux de Marie de Rochefort et cousin de Joachim, par laquelle il reconnaît que la Baronne de Maulévrier est seule fondatrice des Cerqueux et que les Seigneurs de La Sévrie ont droit de sépulture dans le chœur en vertu des accords passés avec les Seigneurs de Maulévrier.
Eusèbe Ier du Puy du Fou seigneur de la Sévrie (fils de François) joua un rôle important pendant les guerres de religion dans les rangs des catholiques. Il adhère de bonne heure à la ligue Catholique et le Duc de Mercoeur lui confie les fonctions de Lieutenant-Général pour la ligue du Poitou, puis le gouvernement de la ville et du château de La Garnache, en Vendée. Le 3 octobre 1569, on le trouve à Moncontour [17] sous les ordres du Duc d’Anjou. Le roi est alors Charles IX. [18]
Le 8 octobre 1590, il s’empara de Mauléon, ex-Châtillon, tenue par les huguenots.
A la fin des guerres de Religion, les Puy du Fou étant ligueurs[19], le Capitaine Baudouin, tenant le château de Vezins et agissant sous les ordres du Roi huguenot Henri IV[20], s’empare de la Sévrie et la pille le 31 janvier 1596. C’est dommage car, selon Célestin Port, le même jour le Comte de La Rochepot[21] accordait une trêve qui ne sera connue que le 4 février 1596.
Voici comment on raconte la mise à sac de La Sévrie :
« Les protestants étaient déjà venus plusieurs fois rôder autour de la Sévrie. Mais ils avaient trouvé à qui parler. Un jour, Baudouin, un des principaux officiers protestants, apprend que Eusèbe du Puy du Fou n’est pas à la Sévrie. Baudouin fait diligence pour profiter de la circonstance. Après un simulacre de défense, la porte de la Sévrie est défoncée. L’ennemi est dans la place, il met le feu. Il n’est pas jusqu’aux tours qui ne sont détruites à coup de fauconneau. Le château eut le même sort que Vilfort, le Pont-Sameau et autres châteaux du pays, car si les guerres de Vendée ruinèrent le pays, elles ne peuvent être comparées avec celles de religion au point de vue des atrocités et des meurtres qui furent commis à cette époque. On raconte qu’à la suite de l’attaque de la Sévrie, un seul homme resta vivant : il s’était caché dans le souterrain de l’Augerie »
Les Cerqueux, situés à la frontière de l’Anjou et du Poitou, subiront de nombreuses échauffourées entre belligérants au cours des guerres de religion. Pendant celles-ci, des bandes de protestants venant du Poitou parcourent notre région en semant la désolation, en pillant et en brûlant tout. Le pillage de la Sévrie en est un exemple et l’entrée du souterrain, encore visible au milieu du XXème siècle dans le jardin de la cure, est certainement un vestige des cachettes utilisées lors de ces guerres civiles.
Les guerres de religion à peine terminées, Eusèbe 1er du Puy du Fou eut un nouveau procès avec le Comte de Maulévrier, Louis Gouffier Duc de Roannez [22], qui voulut profiter des différents continuels entre les Puy du Fou et Daillon. Jusqu’alors, les Seigneurs de Maulévrier se contentaient de la reconnaissance tacite qu’on faisait de leur suprématie dans la paroisse des Cerqueux. Ils n’y avaient fait jamais fait étalage de leur suzeraineté et, insensiblement, les Seigneurs de la Sévrie s’étaient habitués à ne tenir aucun compte des privilèges inemployés par les seigneurs de Maulévrier et à se considérer comme Seigneurs et patrons de la paroisse. Pour couper court à ce comportement, le Duc de Rouannais fit planter devant la porte de l’église des Cerqueux des poteaux avec carcans [23] sur lesquels il fit apposer ses armes, privilège réservé aux Seigneurs fondateurs.
S’il en était resté là, ou du moins s’il s’était contenté de faire placer, comme convenu précédemment, son banc et ses titres au-dessus de ceux de la Sévrie, peut-être ne serait-il pas sorti de la légalité ; mais il trouva plus simple, malgré les concessions antérieures accordées par ses prédécesseurs, de faire disparaître de la dite église toutes les marques et prérogatives dont les Seigneurs de la Sévrie étaient en possession. Cela fut l’origine d’une querelle que nous verrons se renouveler souvent et qui n’ont d’autre fin que la féodalité elle-même.
Eusèbe du Puy du Fou se « regimba » contre ce qui venait de se passer et il adressa une requête au parlement de Paris contre les violences et les excès commis dans l’église des Cerqueux au sujet des droits honorifiques qu’il prétendait avoir, à l’encontre du Seigneur de Maulévrier, suzerain. Le procès, commencé le 29 juillet 1606, se termina en 1650 et débouta Gouffier en donnant le droit aux Puy du Fou d’être enterrés dans l’église. Mais Eusèbe 1er n’en vit pas la fin car il décéda le 6 juin 1610 et fût enterré dans l’église des Cerqueux.
Les registres paroissiaux des Cerqueux débutent en 1606[24]. Le premier acte, un acte de mariage, est signé du Curé Devannes[25]. Au-delà des traditionnels actes d’état-civil, il lui arrive de noter des évènements qui lui semblent importants. Ainsi, en 1615, il note l’importance des neiges qui ont duré du 2 février au 15 mars et des inondations qui ont provoqué de nombreuses pertes. En 1627, il signale l’assassinat d’un marchand de la paroisse qui se rendait à Angers.
Il fait aussi effectuer quelques travaux dans l’église puisque le 30 juin 1635, l’artisan Buisson reconnait avoir reçu du curé des Cerqueux de Maulévrier 250 livres tournois « pour le grand autel, peinture et tableaux d’icelui » et 6 livres tournois « pour la peinture de la Passion et avoir raccommodé le visage de ladite Passion et peinture du bois ».
Le climat tant paroissial que féodal semble des plus calmes en cette première moitié du XVIIème siècle, sous Louis XIII. [26] En 1648, la paroisse intègre le diocèse de La Rochelle tout en restant dans le doyenné de Bressuire. En fait, suivant en cela le vœu de Richelieu, c’est l’évêché qui est transféré de Maillezais à La Rochelle. Le pouillé [27] de 1648 n’indique d’autre bénéfice que la cure, sous le patronage de l’abbé de Saint Jouin de Marnes, avec un revenu de 300 livres.
C’est le 6 juillet 1650 que Françoise du Puy du Fou fit placer dans le caveau du chœur de l’église un mausolée de marbre blanc, avec deux chevaliers sculptés et leur écusson.
Ces bas-reliefs représentaient Eugène du Puy du Fou, gouverneur de la Garnache et Eugène II du Puy du Fou, lieutenant de la vénerie, son fils. Il en restait encore des débris importants dans le jardin de la cure vers 1840. Ces fragments sont aujourd’hui conservés au musée Saint-Jean d’Angers. Le caveau lui-même fut découvert en 1831, sous le chœur. On y trouva cinq grands cercueils en plomb contenant les restes des Seigneurs qui y furent transférés en 1650. Ceux qui ont vu le mausolée y ont relevé l’inscription suivante : « Ci-gisent les Seigneurs de la Sévrie, puînés de la maison du Puy du Fou, savoir… » Suit la généalogie.
Voir à ce propos : « Le saccage de l’église en 1650 »
Au mois de juin 1653, la Châtellenie des Cerqueux fut enfin érigée en Baronnie malgré la vive opposition du Seigneur de Maulévrier.Cette même année, la dame de la Sévrie avait voulu exercer aux Cerqueux le droit de quintaine [28] mais le curé s’y était opposé et le 1er juin, procès-verbal de son refus avait été dressé.
Le 23 mai 1654, un arrêt du Parlement força le curé à comparaître en raison du dit refus et le lendemain, procès-verbal fut rédigé constatant que le jour de la Pentecôte, après vêpres, le Baron de la Sévrie avait droit de quintaine devant la porte de l’église sur les mariés et les mariées de l’année qui étaient tenus de danser, de chanter une chanson et de donner un baiser au dit baron ou gens de sa part.
Nous sommes en 1662, les Gouffier d’alors sont complètement ruinés depuis la guerre de religion où ils avaient fait le mauvais choix. Ils vendent leur fief de Maulévrier à Edouard François Colbert, frère du Grand Colbert. [29]
De Juillet 1663 à sa mort le 9 avril 1684 à 60 ans le curé fut Aubin Brémond. Comme essai de plume, en 1668 il dessine un portrait de prêtre coiffé de la calotte, qui pourrait bien être le sien, et ajoute à la fin de 1669 quelques vers latins relatifs à la tenue des registres paroissiaux.
Le 6 septembre 1674, Monsieur de Colbert de Maulévrier protesta contre l’entreprise qu’avait fait Madame de la Sévrie d’édifier une chapelle [30] dans l’église des Cerqueux ainsi que contre ses titres placés dans la dite église, ses écus peints au vitrail du chœur etc.
Voir le conflit des sacristains en 1700
C’est le curé Jacques Pigeol qui acquiert l’emplacement de la cure et le cède à la fabrique. En 1700, il signe une convention avec Monsieur de Montbault de la Sévrie pour la propriété du presbytère. Les monuments historiques, lors de leur pré-inventaire de 1977, dateront la restauration du presbytère à 1707. [31] Avant que le presbytère ne soit détruit à la fin des années 1970, on voyait encore, au linteau d’une fenêtre donnant sur le jardin, le nom de Pigeol accolé à la date : 1707.
Le curé Pigeol réussit à maintenir les revenus de la cure au prix de nombreux procès. Il consacre largement ces revenus à la décoration de l’église dont il restaure les autels en les parant de tableaux, commandés à Ernou d’Angers (1699) et à Louis Courant, peintre de Thouars (14 juin 1711) et de divers autres ornements.
Le curé Clémenceau, curé de Saint-Aubin de Baubigné de 1701 à 1741, fit vraisemblablement partie de ceux ayant un différent financier avec le curé Pigeol. Très attaché au recouvrement des dîmes normalement dues à sa cure, voici ce qu’il écrit à la page 38 de ses relevés de 1721, non sans un léger dépit et l’ébauche d’une mesquine vengeance concernant Boisdon :
« Les dîmes que lèvent pour la paroisse les Curés des Cerqueux de Maulévrier qui lui ont été données par Jeanne des Cerqueux, Dame de La Sévrie, doivent être regardées comme inféodées. Ces dîmes sont sur des domaines de la Sévrie. L’acte de donation est ancien, je l’ai relevé. Les dîmes, pour moi, avaient été usurpées et devaient être la restitution à une église de ce qu’on avait volé à une autre. Mais elles sont appelées inféodées dans la donation et quand même cela ne serait point, la possession est si longue que le Curé des Cerqueux l’invoque contre le droit des Curés de Saint Aubin. On ne peut donc demander à présent que les nouvelles, excepté quelques terres qui sont de la métairie de Boisdon qui est de la paroisse des Cerqueux et qui se trouvent situées dans la paroisse de Saint-Aubin parce que ces terres ne sont pas dénommées dans la donation et que les Curés de Saint-Aubin ne sont pas dédommagés de cette dîme. »
Monseigneur Etienne de Champflour, évêque de La Rochelle, visita la paroisse le 11 octobre 1707, accompagné de l’abbé de Saint-Jouin de Marnes. Il constata que l’église, les autels, les vases sacrés et les ornements sacerdotaux étaient en bon état. Il note aussi que 360 personnes [32] communient régulièrement et qu’il n’y a pas de protestants. La Chapelle Notre-Dame de Daillon vaut 30 l., celle de Ste-Catherine est, comme la première, à la nomination du seigneur de Daillon. La chapelle Saint-Gilles, à la nomination du seigneur de la Sévrie, était entre des mains laïques (le procureur fiscal de Vihiers, « dont on ignore où il fait ses Pâques« . Elle valait 100 l. La chapelle Notre-Dame des Poisats, à la nomination du même seigneur, était desservie dans l’église, la chapelle elle-même n’étant point en état. Il y avait un vicaire, pas de confrérie du St-Sacrement. Le curé Pigeol se proposait de l’établir.
Ce dernier décédera le 6 avril 1727 à 70 ans. Par son testament du 22 février 1727, il laissa à la cure, entre autres dons, sa bibliothèque de 400 livres « divisée à peu près également en ouvrages de théologie et de pratique pastorale ». Il est remplacé par Charles-Auguste Bonnamy de Bellefontaine né à la Rochelle le 21 mars 1701. Bachelier de la Sorbonne, curé de Maillezais de 1726 à 1727, curé des Cerqueux de 1727 à 1730, Prieur de Bouillé de 1737 à 1738 et inhumé à Maillezais le 6 novembre 1768. Il aura comme petit neveu son homonyme Charles-Auguste Bonnamy de Bellefontaine, né en 1764 à La Meilleraie-Tillay et décédé en 1830 à La Flocellière. En 1796, sous le Directoire, il achètera le château de La Flocellière comme bien national. Le nom du Général Bonnamy est inscrit sur le côté Ouest de l’arc de Triomphe à Paris en tant que Général d’Empire.
En 1727, (Le Roi était alors Louis XV [33]) la paroisse des Cerqueux résolut de refondre ses cloches et le seigneur de la Sévrie voulut imposer l’obligation d’y reproduire ses armes comme Seigneur de la paroisse. Mais la Comtesse de Maulévrier fit signifier au curé, ainsi qu’aux paroissiens et fondeurs, les arrêts qui donnaient à son mari seul le droit d’avoir ses armes sur les cloches.
Grand alors fut l’embarras aux Cerqueux. Enfin on se décida à obtempérer aux injonctions venues de Maulévrier en prenant toutefois les précautions qu’exigeaient les circonstances. A cet effet, le curé [34] se transporta à Maulévrier, près de Marie Catherine Euphrasie d’Estaing, Comtesse de Maulévrier et, le 28 juillet 1727, il en obtint une garantie contre les poursuites que pourrait intenter le Seigneur de la Sévrie.
Jean-Baptiste-Antoine de Brancas, évêque de La Rochelle de 1725 à 1729, rendit à son tour visite à la paroisse des Cerqueux le 1er octobre 1728. Il en fit le compte-rendu suivant [35]:
« Sur les 9 heures du matin, le Sieur Charles-Auguste Bonnamy de Bellefontaine, curé, est venu nous prendre au presbytère et nous a conduit processionnellement à l’église, accompagné du sieur Brémault son vicaire, et de quelques uns de ses confrères, où il nous a reçu avec les cérémonies ordinaires. Nous y avons célébré la sainte messe, donné la communion a plusieurs personnes et administré la confirmation à 80. Après les prières pour les morts, chantées dans l’église, nous avons été processionnellement dans le cimetière que nous avons trouvé en bon état et bien fermé de murs.
Les fonts baptismaux sont en bas de l’église, dans un endroit fort sombre. Ils sont entourés d’une petite balustrade en forme de dais. Les eaux baptismales sont dans un vase de fonte et les saintes huiles dans des crémeaux d’étain, à l’exception de l’huile des infirmes qui est dans un petit crémeau d’argent assez propre.
Les confessionnaux sont bien grillés. Il y a deux petits autels collatéraux, l’un sous l’invocation de la Sainte-Vierge, assez proprement orné, à l’exception du tableau qui est très mauvais : nous avons ordonné d’en faire faire un autre ; l’autre sous l’invocation de Saint-Gilles qui est en très mauvais état. On n’y dit point la sainte messe à cause de sa malpropreté. Nous avons ordonné qu’incessamment, à la diligence du sieur curé, l’autel sera orné proprement et raccommodé de telle manière qu’on y puisse décemment y dire la sainte messe et y acquitter le service dont la chapelle de Saint-Gilles est chargée.
Le grand autel est assez propre, le tabernacle est de bois doré et en dedans doublé d’une petite étoffe de soie. Le Saint-Sacrement repose dans un ciboire d’argent assez propre, bien doré en dedans. Il y a aussi deux calices. L’un est de vermeil avec sa patène, très propre quoiqu’ancien, l’autre est d’argent avec sa patène, fort beau et bien doré en dedans. Il y a une custode de vermeil fort belle. Il y a aussi une boite où on avait coutume de mettre le Saint-Sacrement, laquelle n’est point dorée en dedans. Nous avons défendu de s’en servir à l’avenir, qu’elle ne soit dorée et qu’il n’y ait une croix dessus. Il y a le haut d’un soleil de vermeil assez propre, mais le croissant n’est pas doré, nous avons ordonné de le faire dorer incessamment. Le pied du soleil est commun avec celui d’un des calices.
La sacristie est à côté du grand autel, du côté de l’épitre. Elle est assez propre et commode. Nous avons trouvé des ornements de toutes les couleurs, très simples, plusieurs même déchirés par devant, que nous avons ordonné de faire raccommoder et défendu de s’en servir qu’ils ne soient. Il y a deux chasubles noires très mauvaises : nous avons ordonné que des deux on n’en ferait qu’une en attendant qu’on en achète une. Il y a assez de linge.L’église est petite et fort sombre. La cure, à notre nomination, vaut 1 200 livres. [36]
La chapelle de Notre-Dame de Daillon, chargée de la messe tous les dimanches et d’une autre messe par semaine ; pour lesquelles deux messes nous avons taxé la rétribution à 26 L chacune par an, vaut 7 charges de blé. Elle est possédée par le sieur Prudhomme, clerc. Elle est à la nomination du Seigneur de Daillon.
L’autre chapelle de Notre-Dame de Daillon, possédée par le sieur Herbert, de Chemillé, diocèse d’Angers, chargée d’une messe par semaine, à la nomination du seigneur de Daillon, vaut 70 L.
La chapelle de Saint-Gilles, chargée de deux messes par semaine, à la nomination du seigneur de La Sévrie, possédée par le sieur François, chanoine de la cathédrale de La Rochelle, vaut 150 L.
La chapelle de Notre-Dame des Poizats, possédée par le même, à la nomination du même seigneur, chargée de deux messes par semaine, vaut 30 L.
Il y a 300 communiants.
La fabrique vaut 32 L de rente foncière et deux charges de blé. Le fabriqueur a arrêté ses comptes depuis peu. Il y a une confrérie du Saint-Sacrement dont un registre des confrères. Le Saint-Sacrement est exposé tous les 3èmes dimanches de chaque mois. »
En ce qui concerne la confrérie du Saint-Sacrement, voici ce que le Curé Clémenceau, curé de Saint-Aubin de 1701 à 1740, écrit en 1721 à propos de celle qu’il a créée dans sa paroisse :
« Je n’ai mis dans cette confrérie que des hommes afin de les faire approcher plus souvent des sacrements et j’ai eu la consolation de voir qu’ils ont répondu à mes intentions au-delà même de ce que j’en avais espéré au commencement.
J’ai choisi pour confrères des chefs de familles et ceux qui le pouvaient devenir afin qu’ils fussent des exemples dans leurs maisons et qu’ils m’aidassent dans l’instruction et la conversion de ceux qu’ils avaient sous eux.
J’ai empêché que les femmes fussent de cette congrégation. Ce n’a été qu’afin de nous mettre en état de pouvoir confesser régulièrement une fois par mois les confrères, sachant d’ailleurs que les femmes étaient d’elles-mêmes portées à la fréquentation des sacrements et qu’elles avaient le Rosaire pour satisfaire leur dévotion.
Les Confrères doivent se confesser une fois par mois.
Ils ne doivent aller au cabaret que par nécessité.
Ils doivent être très unis entre eux.
Ils se doivent assistance dans la maladie et la mort.
Ils doivent assister aux expositions et processions du Saint-Sacrement.
En entrant dans la confrérie, ils sont obligés de faire une confession générale. »
Les disputes entre les deux châteaux de La Sévrie et Maulévrier au sujet des honneurs et privilèges dans l’église des Cerqueux, qui duraient depuis des siècles, continuèrent de plus belle avec Jeanne Baron, dame de la Sévrie, veuve de Philippe de la Haie-Montbault.
Dès le 12 octobre 1752, Jeanne Baron avait sommé le curé [37] des Cerqueux de la nommer à ses prônes comme Baronne, patronne et fondatrice de la paroisse et le 17 mai 1755 elle interdit au même curé de donner ces qualités au Seigneur de Maulévrier.
Celui-ci, de son côté, défendit au curé d’obtempérer à cette sommation de la dame de la Sévrie. Le 23 septembre et le 1er octobre de la même année, il signa deux protestations contre le dit Seigneur de la Sévrie. La première pour s’être permis de faire planter un poteau devant la porte de l’église des Cerqueux, la seconde pour avoir apposé au dit poteau un carcan et un collier de fer. [38]
Pour terminer avec l’église des Cerqueux sous l’Ancien régime, Célestin Port, dans son Dictionnaire historique de l’Anjou, rapporte que le 5 avril 1772 eut lieu une translation d’une relique de la Vraie Croix en présence de nombreux ecclésiastiques de la région. [39]
Il précise aussi qu’au XVIIIème siècle, le vicaire de la paroisse était chargé de faire les catéchismes aux petits enfants et de tenir l’école en vertu d’accords passés avec le curé.