Bien malin celui qui peut aujourd’hui démontrer avec assurance l’étymologie du nom de la commune. Ce que l’on sait avec certitude, c’est que la paroisse des Cerqueux appartenait au XIIème siècle à l’Abbaye de Saint Jouin de Marnes, mais elle est sans doute de création plus ancienne. C’est dans la bulle de 1 179, ou Nicolas, prieur de l’abbaye, obtient du Pape Alexandre III la reconnaissance des possessions de l’abbaye, que l’on voit apparaître pour la première fois la mention de l’église des Cerqueux de Maulévrier : « Ecclesiam de Sarcos de Malebrario » [1].

Au fil du temps, la paroisse puis la commune se verront nommées de bien d’autres façons jusqu’à l’appellation « Les Cerqueux » actuelle.

  • En 1309 : Serquex de Maulévrier
  • En 1448 : Sarcofaye
  • En 1648 : Sercueils de La Séverie
  • En 1652 : Serqueux de Maulévrier
  • En 1668 : Cercofagi de Monlevro
  • En 1790 : Les Cercueils de Maulévrier
  • Puis       : Les Cerqueux de Maulévrier
  • Puis       : Les Cerqueux (Journal officiel du 10 août 1996)
Divers Pont Diane

Le pont Diane de nos jours

On ne trouve aux Cerqueux aucun vestige Gallo-Romain, à part, peut-être, le pont que l’on appelle aujourd’hui « Pont-Diane », sur la route d‘Etusson, après la Grande-Troche et qui marque la limite entre le Maine et Loire et les Deux-Sèvres, sur la petite rivière de « La Pommeraye ». Pourtant, dans le Bulletin Archéologique du Comité des travaux historiques et scientifiques [2], Monsieur Gabillaud indique avoir adressé au comité une note additionnelle concernant deux stations romaines à La Cantinière et à La Grande Troche, ce qui ne semble pas surprenant au vu de la proximité de la voie romaine reliant Angers à Saintes.

Par contre, les monuments celtiques abondent – ou plutôt abondaient – aux Cerqueux, mais dans un périmètre circonscrit aux Foucheries (Petite et Grande), à la Petite et Grande Troche et à la Gannerie.

Voir à ce sujet l’étonnant rapport établi par le Docteur Atgier [3] auprès de la société des arts et lettres de Cholet.

En 1896, le Docteur Atgier déclare :

« En réfléchissant alors à l’étymologie du mot Cerqueux, je pensai qu’il a du être donné au bourg ainsi appelé à cause de la présence de ces nombreux cirques, chromlechs ou enceintes de pierres, le mot latin Circus signifiant une enceinte primitivement circulaire où avaient lieu des jeux, des sacrifices ou des rites sacrés.

Le mot Cerqueux serait, par ce fait, un vieux mot gallo-romain dérivé du mot latin Circus, cercle, et synonyme de Chromlech, mot moderne formé avec des racines celtiques (chrom, cercle et lech, pierre sacrée). Cette supposition est donc contraire à l’opinion généralement admise qui fait provenir Cerqueux du latin Sarcofagi, Les Cerqueux ou Cercueils, qu’on trouve dans les chartes, sans doute à cause des nombreuses sépultures antiques qu’on y voyait alors. »

Par CP en 1872

La « Pierre levée » fin XIXème. Photo CP aux ADML

A noter toutefois que, face au Docteur Atgier, qui voit, à travers les mégalithes de la Gannerie, « un trépied de sorcière celte ou de druidesses, qui servait aux sacrifices, et sur lequel elles montaient pour prophétiser », Messieurs Godart-Faultrier [4] et Desmazières les considèrent comme problématiques, sinon douteux.

Ce qui est par contre établi, c’est qu’on a trouvé sur le territoire de la commune deux haches de pierre polie en diorite [5] et que les lieux dits Le Vas des pierres, La Pierre Levée, le Grand et le Petit Chiron révèlent un habitat préhistorique. [6]

Il n’est donc guère douteux que les Cerqueux ont abrité d’importantes nécropoles néolithiques. Voici ce qui était relaté dans le « Bulletin des antiquaires de l’ouest » [7] :

« Monsieur Gillot signala sur la voie romaine menant de Saintes à Angers le lieu-dit « Les Cerqueux de Maulévrier » … Cerqueux, dont les formes anciennes sont « serqueu, Serqueuil, Sarco, Sarchia », traduites ici par « Cercueil, Sépulcre, Sarcophage » … Les archéologues connaissent ces anciennes nécropoles dont l’importance d’alors n’est pas en rapport avec la population actuelle des localités … Nul doute que Les Cerqueux de Maulévrier n’aient possédé une ancienne et importante nécropole dont ils ont tiré leur nom. »

Dans son livre « Mégalithes en Anjou » [8], Michel Gruet indique que selon lui les divers monuments découverts aux Foucheries et environs sont «  indiscutablement des blocs en position naturelle « , tout en signalant que le Docteur Atgier, en « vidant les terres que contenait une des cuvettes naturelles d’un de ces blocs, y a trouvé deux lames de silex taillé. »

Donc étymologie provenant des cercles, circus, chromlech ou de sarcophage ?

En synthèse, je propose de lire ce qu’écrit Pierre-Louis Augereau [9] dans un chapitre intitulé : Hêtres sacrés et sarcophages.

« En fait, les cercles les plus intéressants à observer se trouvent sur le territoire des Cerqueux, même si là non plus les spécialistes ne sont pas d’accord sur le caractère naturel ou artificiel de ces cromlechs. Le plus connu est celui du hameau des Foucheries, mais au cours de ses pérégrinations à cheval à la recherche des mégalithes choletais, le Docteur Atgier en avait repéré d’autres à la Petite-Troche, à la Grande Minaie[10] et à la Gannerie. Sur le plus gros des six blocs de la Petite-Troche, il avait remarqué d’étranges empreintes dans lesquelles il n’hésitait pas à voir la représentation de feuilles de gui et de cupules de glands. Dans le contexte « Celtomaniaque » de l’époque il ne lui en fallait pas plus pour conclure que les druides grimpaient sur ce piédestal afin de recevoir le gui cueilli dans les hautes branches des chênes qui poussaient alentour.

e pierre levEE

La Pierre Levée aujourd’hui

Toujours d’après lui, les cercles de pierre n’étaient pas uniquement utilisés dans un but religieux puisque les druides étaient également les philosophes, les magistrats et les médecins de la civilisation celtique. Si bien qu’il estimait que le petit village des Cerqueux «aurait donc eu jadis, bien loin dans les siècles, ses jours de splendeur et aurait été à la fois un centre religieux, juridique et militaire. »

Autre explication avancée : le nom des Cerqueux serait en fait un synonyme de cromlech puisqu’il viendrait d’un vieux mot gallo-romain dérivé du latin circus, c’est-à-dire cercle.

L’étymologie est séduisante. Mais reflète t’elle pour autant la réalité ? Ce n’est pas certain. Sur le cartulaire de Saint-Nicolas qui date de 1080, les Cerqueux s’appellent Sacrofagi, et sur celui de Chemillé qui date de 1200, les Cerqueux portent le nom de Sarcofaga. Les Cerqueux pourraient donc être une déformation de Sarcophagus. (Le Tombeau des Latins), de la même façon que sarcophage est à l’origine du mot cercueil.

Reste à savoir où se trouvent sur le territoire communal les fameuses sépultures en question…

A moins que la troisième hypothèse soit la bonne : la racine latine « fagus » signifie « hêtre ». C’est la présence de ces hêtres qu’on appelle aussi fayards, qui a donné son nom, par exemple, à Faye d’Anjou. Quand à Torfou (Tortus Fagus) et au Puy du Fou ils signifient respectivement « Le Hêtre tordu » et « La colline du hêtre». Et, pour Les Cerqueux, Sacrofagi pourrait vouloir dire « hêtres sacrés », ces arbres étant, tout comme les chênes, particulièrement vénérés par les druides. »

Alors… Cercles funéraires, sarcophages, hêtres… ? A vous de choisir.

[1] Célestin Port. Cartulaire de St Jouin de Marnes
[2] Leroux éditeur, Paris 1913
[3] 1850-1915 Président de la Société Préhistorique Française
[4] Victor 1811-1895 Archéologue
[5] Dont une est au musée de Cholet
[6] Célestin Port. « Dictionnaire historique, géographique et bibliographique du Maine et Loire »
[7] Bulletin de la Société des Antiquaires de l’Ouest -Edition de 1930-Page 572
[8] Edition Cheminements 2005
[9] « Les Mauges mystérieuses » édition Cheminements, page 54 et suivantes
[10] Nom d’un champ de la Grande Foucherie

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