La mission décennale, qui dure de 3 à 4 semaines, et dont on parle en chaire et dans les commerces du bourg près d’un an à l’avance, est l’élément central de la stratégie d’occupation du terrain par les prédicateurs.
La veille de l’ouverture de la mission toute la paroisse, oriflammes et bannières déployées, se porte au-devant des missionnaires. « Accourez peuple fidèle » chante la foule. Le lendemain matin, après la messe, débutent les instructions. D’une voix tonitruante, aux effets étudiés, le prédicateur joue sur l’angoisse inhérente de la mort pour amener ses auditeurs au repentir et à la conversion. Il souligne l’obligation d’assister à la messe les dimanches et jours de fêtes de l’église, surtout de ne communier qu’en état de grâce.
Entre les instructions du matin et du soir, et hormis leur présence au confessionnal, les missionnaires visitent chaque maison et y prodiguent leurs conseils.
Une ou deux fois par semaine, ils organisent un spectacle liturgique dans l’église, à la lumière des cierges : consécration à Marie des jeunes filles, vêtues de blanc et de bleu, une couronne dans les cheveux ; fête des enfants habillés en anges, en religieux ; renouvellement des promesses du baptême ; adoration nocturne de l’Eucharistie, commencée par une grand-messe poursuivie silencieusement jusqu’à l’aube ; enfin commémoration des défunts avec procession (toujours nocturne) du cimetière à l’église dans laquelle est dressé un grand catafalque ; après les vêpres des défunts, le prédicateur fait l’appel de tous les paroissiens décédés depuis la dernière mission et invite à prier pour ceux qui n’assisteront pas à la suivante.
La communion générale des femmes, puis des hommes, prélude à la cérémonie ce clôture : qui oserait s’y dérober ?
Enfin vient la « plantation » de croix, portée au lieu de son érection par des « escouades » d’hommes placées le long du parcours de la procession, orné de guirlandes, tentures et d’arcs de triomphe fleuris.
Tout le village engage son honneur dans cette parade finale, achevée par un dernier salut du Saint-Sacrement.
D’après :
Les Diocèses de France-Le Diocèse d’Angers. Collection dirigée par Françoise Lebrun
Beauchesne éditeur 1981. Pages 199-200